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Et si l’alimentation était un jeu?

le plateau de jeu du légume

Tous les parents se posent la question « Est-ce que l’alimentation que je donne à mon enfant est correcte? » éternelle question, grosse pression…et si l’alimentation pouvait devenir un sujet beaucoup moins stressant en y associant le jeu?

Dans les médias, partout, on nous brandit des règles à respecter, on nous met en garde contre le trop sucré, le pas assez de légumes, le pas assez équilibré, bref tout pour nous faire culpabiliser.

Je suis d’accord, l’alimentation est un sujet essentiel et avec nos enfants, il vaut mieux installer de bonnes habitudes dès le plus jeune âge, il est donc nécessaire pour les parents de connaitre les bases de l’équilibre alimentaire et de posséder beaucoup de bon sens😉.

Vous êtes des parents supers et vous faites de votre mieux pour donner à vos loulous une éducation alimentaire la meilleure qui soit, j’en suis certaine!
Le décor étant posé, il faut rappeler que le repas est un moment qui doit être calme et serein, un moment de partage.
Alors pour que l’alimentation ne soit pas un combat au quotidien, pourquoi ne pas introduire le jeu?

De la naissance à 4 mois

De la naissance à 4 mois, l’alimentation de l’enfant est uniquement constituée de lait maternel ou maternisé, sa composition est idéale par rapport aux besoins de l’enfant.
Dans le cas du lait maternel, goûts et saveurs sont liés à l’alimentation de la maman, la diversification portée par le liquide amniotique avant la naissance se poursuit ici.
Sauf cas particulier, il n’y a pas de rejet de la part de l’enfant, un lien se crée entre lui et vous, vous êtes la connexion entre l’aliment et lui.
C’est un moment privilégié, profitez-en pour construire des moments câlins, sereins pendant lesquels vous êtes entièrement avec votre enfant, le repas est un moment plaisir, en conscience !
Vous commencez à établir les règles du jeu : le repas est un moment calme, un moment plaisir, un moment de partage.

L’alimentation de 4 mois à 2 ans

Dès la naissance, la saveur sucrée est très appréciée des enfants, alors que l’amer et l’acide sont rejetés. La saveur umami bien que peu proposée à cet âge est acceptée, la saveur salée quant à elle ne présente pas d’intérêt particulier pour le nourrisson mais cet intérêt va aller en grandissant lors de la diversification alimentaire.

A partir de 4 mois, vous allez commencer à présenter à votre enfant des fruits et légumes cuits mixés, choisissez des légumes peu fibreux, aux arômes doux, pas trop puissants, présentez lui un légume ou un fruit nouveau à chaque fois pour bien identifier les goûts qu’il aime et ceux qui sont plus difficiles à « avaler », cela vous permettra d’appréhender la prochaine fois où vous présenterez l’aliment.
Cela vous permet également de nommer les aliments, pour l’enfant la mémorisation sera plus simple si on lui présente les produits de façon individuelle.
Une étude menée par le CNRS, montre que plus la variété des aliments introduits est élevée en début de diversification, plus la réaction ultérieure des enfants est positive pour ces aliments.
La période entre 5 mois et 7 mois est particulièrement propice et favorable aux découvertes alimentaires.

A partir de 6/8 mois, on va introduire les protéines animales, viande, poisson, œuf, laitages type yaourt…
Beaucoup de nouvelles découvertes gustatives en perspective…

Jeune enfant qui mange avec ses doigts

Vers 10/12 mois, l’enfant va découvrir de nouvelles textures, on passe du « tout mixé » à des consistances grumeleuses (purées écrasées), des petits morceaux, la diversité sensorielle se développe.

Entre 12 et 24 mois, on poursuit l’initiation gustative et on va pouvoir proposer à l’enfant des aliments plus forts en goût ; chou, céleri, champignon, fruits exotiques.

Pendant toute cette période, l’enfant est plutôt ouvert à l’exploration de nouvelles saveurs, cependant, il ne faut pas oublier que les conditions dans lesquelles l’enfant fait cet apprentissage sont particulièrement importantes.
Lorsque l’ambiance autour du repas est apaisée, joyeuse, l’enfant se sent bien, les aliments nouveaux seront associés à des émotions positives, l’acceptation de la nouveauté sera d’autant plus facile.

Pour stimuler les plus jeunes, on va utiliser les imagiers pour nommer, il peut être intéressant de montrer à l’enfant le produit « en vrai »et entier à côté de l’imagier, ainsi l’aliment n’est plus inconnu.
On peut le laisser manipuler les fruits, légumes entiers d’une part mais aussi en morceaux, la texture, le contact est important, la peau lisse de la pomme, celle plus rugueuse du citron, le côté sec d’une rondelle de banane et le juteux d’un morceau de melon, etc…

On peut faire référence à des contes, des histoires dans lesquels certains aliments sont décrits, mettre en avant ce que mange tel ou tel personnage, tel ou tel animal.

Le doudou peut également servir de lien entre l’enfant et l’aliment à vous de jouer 😉 !

L’âge critique entre 2 et…. 8 ans

Pas de panique!
Selon les enfants, les attitudes sont bien différentes et ne durent pas forcément si longtemps !

Alors que se passe-t-il ?
Vers 2 ans, l’autonomie de l’enfant se développe, il commence à manger seul, ses préférences alimentaires s’affirment, c’est la période du « NON »!
Non à tout, donc la nourriture a le droit aussi au « NON ».

néophobie alimentaire. Refus de manger des aliments inconnus

Pour les parents le casse-tête commence…
C’est vers 3-4 ans que la néophobie, ce sentiment de peur devant de nouveaux aliments, de rejet, est la plus forte.
L’enfant refuse même des aliments qu’il prenait plaisir à manger quelques semaines plus tôt.
En fait, dès qu’un facteur est modifié par rapport à la présentation de l’aliment qu’il connait, la couleur, la taille des morceaux, la présence d’herbes aromatiques….., l’enfant considère qu’il est nouveau et le repousse.
Il établit comme un rempart de sécurité à tout ce qu’on lui présente.
Cette phase est normale entre 2 et 10 ans, elle disparait cependant le plus souvent autour de 8 ans, dure plus ou moins longtemps suivant les enfants.
Que faire au quotidien pour apporter une alimentation saine à son enfant quand il refuse tout ou presque…..
Jouez ! Ils sont justement à l’âge où tout est jeu.

Les règles du jeu

  • Il existe des règles nutritionnelles à respecter pour prodiguer une alimentation saine à vos enfants. Vos devez connaitre les grandes lignes pour équilibrer et diversifier les repas de toute la famille. Vous êtes le maître du jeu. Jusqu’à l’âge de 10 ans ce sont les adultes qui établissent ces règles.
  • Le repas doit être un moment agréable de partage, un environnement serein se traduira par des émotions positives et facilitera la découverte de nouveaux aliments.
    Ne vous prenez pas la tête, essayez que les repas restent joyeux et animés pour vos enfants comme pour vous, évitez les conflits et …. vous avancez de trois cases!
    Rien ne sert de forcer votre enfant à finir absolument son assiette s’il ne le veut pas, là vous perdez 2 points et encore moins de faire du chantage avec récompense à la clé, vous perdez votre tour et s’il s’agit d’une récompense alimentaire, vous allez direct en prison.
    Le repas doit rester un moment plaisir, il vaut mieux présenter l’aliment plusieurs fois (jusqu’à 10 fois) pour qu’il y ait accoutumance, plutôt qu’un rejet total par l’enfant qui sera beaucoup plus long à contrecarrer.
    Par contre ne préparez pas autre chose à la place, arrangez vous pour être sûr(e) qu’au repas suivant il ait suffisamment à manger !
  • Proposez un seul aliment nouveau à chaque fois, pour qu’il soit bien identifié, si vous faites une variante, même principe, une à chaque fois, il faut avancer doucement, ne pas brûler les étapes, vous pouvez rejouer.
  • Comme pour tous les apprentissages, celui de la table passe par le mimétisme, donc le plus important est de passer le maximum de repas ensemble, avec vos enfants, et à vous de montrer l’exemple, là vous obtenez un joker…. parlez des aliments que vous aimer, mangez diversifié, innovez, découvrez et là vous décrochez le bonus!

Les extensions du jeu

Pour enrichir le jeu du repas et s’affranchir des étapes plus facilement, vous pouvez aborder le sujet en dehors de la table et démystifier certains aliments.

cuisiner avec son enfant, le laisser manipuler les aliments
  • Nommez, montrez, parlez des aliments par le biais d’imagiers, de livres, de lotos, de coloriages…
  • Allez au marché ensemble pour voir les produits, profitez en pour regarder les différentes variétés d’un même fruit, les différentes couleurs des légumes…, participez à des cueillettes, préparer un coin jardinage pour faire pousser vos fruits, légumes et plantes aromatiques, le fait de suivre le développement des plantes est stimulant pour l’enfant, c’est concret, palpable.
  • Laissez vos enfants manipuler les aliments, les goûtez, cuisinez avec vos bambins, vous retrouverez quelques conseils dans cet article, en les laissant participer à la préparation du repas, les aliments deviennent plus familiers, l’enfant prend conscience de la transformation du produit avant qu’il n’arrive dans son assiette.
    Il est plus à même d’accepter de goûter à des plats qu’il a aidé à préparer.
    Dans les jeux, on peut mettre à disposition une dinette, une cuisine pour que l’enfant puisse jouer à préparer les repas, à parler des aliments, nourrir son doudou…
  • Faites des jeux autour du goût, loto des odeurs, des goûts, pour décrire, mémoriser et reconnaitre les aliments.
    Si vous ne l’avez pas encore fait, demander vos fiches jeux, lien en fin d’article!

A partir de 10 ans

On peut commencer à leur laisser un peu la main sur l’établissement des menus, en conservant les règles nutritionnelles de base.

petits challenges en cuisine

Pensez aux repas tapas (pas tous les jours !) plein de petites choses à manger pour tous les goûts, que l’on peut équilibrer fac t ça invite à la nouveauté!

Les jeux à cet âge peuvent prendre plus la forme de petits challenges, de petits défis, trouver une nouvelle épice pour le prochain plat de poulet ou la tartinade de l’apéro.
Utiliser le plus de mots possibles pour caractériser un plat ; sa couleur, son odeur, sa saveur, ses arômes, sa texture.

Suivant la sensibilité de chacun, parent et enfant, on peut faire des petites expériences physico-chimiques pour comprendre comment les blancs en neige « montent », pourquoi le pain est une pâte levée, que se passe-t-il lors de la cuisson d’un gâteau?
Pour les écologistes, on va chercher à comprendre la permaculture et comment on associe la culture des différentes plantes.
Pour les anti-gaspi, on va s’amuser à cuisiner les épluchures.

L’adolescence est une période de transition, un ensemble de bouleversements physiques, hormonaux et psychologiques.
A l’adolescence, les besoins énergétiques vont être bien plus importants, la consommation alimentaire va donc augmenter de façon non négligeable, il faut penser à proposer des plats qui rassasient. C’est une période où l’on cherche le gras et le sucré, il faut donc penser à équilibrer en fonction de ces données.

Pas si facile lorsque l’on sait qu’à l’adolescence le jeune partage des codes, un langage, des goûts musicaux, une manière d’être donc de se nourrir qui le rattache à un groupe. La personnalité change, le jeune évolue, il revendique son indépendance, il affirme son identité et …ses propres goûts alimentaires.

Le jeune adulte apprivoise la saveur amère qui jusque là était plutôt rejetée, il commence à consommer du café et apprécier la bière 😀!
Laissez le cuisiner, qu’il puisse vous initier à ses goûts, pourquoi ne pas apprendre à faire un super hamburger, les plus grands chefs sont eux-mêmes convertis au street food, goûtez, évaluez avec lui, comparez un Mac Do avec un hamburger maison.
Jouez à Top chef ou au Meilleur pâtissier à la maison, proposez vos règles et mettez en place des « épreuves », des recettes improbables, pas forcément compliquées en termes techniques, axez plutôt sur la diversité, l’acceptation de certains légumes délaissés, la découverte d’épices qui en une pincée transforment le plat.
Cherchez des recettes exotiques et partez en voyage culinaire…

A partir de 20 ans , les goûts alimentaires et les préférences sont stables, elles continuent à évoluer mais de façon beaucoup plus lente, en fonction de la culture, de l’environnement et de l’âge.
En vieillissant, notre odorat perd de son acuité, on a parfois besoin de plats plus puissants, plus marqués en goût mais il n’y a pas de limite d’âge pour découvrir de nouveaux arômes.

repas détendu en famille

L’alimentation est un sujet crucial, son apprentissage est essentiel pour éduquer nos enfants et les conduire vers une alimentation saine, variée et créative.
La malbouffe est responsable de nombreux décès et de cas toujours grandissants d’obésité, le constat est alarmant, ce n’est donc pas un sujet à prendre à la légère, pour autant, il ne faut pas tomber dans l’excès inverse, la méthode pour s’alimenter correctement avec les éléments scientifiques dont on dispose aujourd’hui se construit dans le temps.
Si votre enfant ne mange pas assez de légumes par rapport à ce qu’il faudrait pendant quelques mois, ce n’est pas grave, le rééquilibrage va s’opérer sur la durée, ce qu’il est important d’instaurer, c’est une ambiance de repas sereine, de partage, de découvertes gustatives.
Le repas doit être associé à des moments agréables et pour que s’installe ce sentiment chez votre enfant, il vous faut montrer l’exemple!!


Si votre enfant se développe dans une famille où les grandes règles nutritionnelles sont respectées, où il est normal de manger beaucoup de légumes, où l’on teste de nouvelles recettes, où l’on s’amuse à varier les cuissons, les présentations, cela deviendra parfaitement naturel pour lui.
Les grandes règles d’une alimentation équilibrée sont accessibles à tous, il faut ensuite faire preuve de bon sens, de beaucoup de patience (si, si, soyons honnête, il en faut beaucoup!!), pour que le repas reste un moment de plaisir et d’apprentissage.
Apprentissage sur les goûts bien sûr mais également sur toutes les disciplines qui ont un lien avec l’aliment, la culture et permaculture, la cuisine, la chimie, la botanique, la sociologie, l’histoire….
Tout ces thèmes liés à l’alimentation peuvent être amenés par le jeu pour que les découvertes soient ludiques et mieux appréhendées.
Souvenez-vous, le maître du jeu, c’est vous!

Partagez avec nous les astuces et jeux que vous mettez en place pour que les repas se passent bien chez vous.

Sources:
Rigal, N , La naissance du goût : comment donner aux enfants le plaisir de manger, 2000, éditions Agnès Vienot, Paris.

Briand, L, Le goût une affaire de nez ? 80 clés pour comprendre le goût, 2021, éditions Quae, Versailles

Pliner, P, La néophobie génératrice de régimes alimentaires individuels : causes et conséquences, colloque sur les alimentations particulières, 2012, https://www.lemangeur-ocha.com/content/uploads/2012/04/colloque-ocha-alimentations-particulieres-PLINER.pdf, consulté en 2021.

N'hésitez pas à partager, un grand merci d'avance ! :)

10 réflexions sur “Et si l’alimentation était un jeu?”

  1. Merci pour cette présentation de repas, qui nous apporte une belle énergie en plus de celle que nous ingérons 😉 !
    Très importante à conserver en tête !

  2. Je me souviens petite qu’on me disait qu’il ne fallait pas jouer avec la nourriture. Le repas c’était du sérieux ! Mais aujourd’hui, on a compris que grâce au jeu, on peut apprendre énormément et démystifier certaines croyances. C’est un vrai jeu et un défi pour moi de trouver les astuces qui feront aimer certains aliments à mes enfants ou leur faire découvrir / redécouvrir de nouvelles saveurs ! Et je peux dire que ça marche pas mal, car ils mangent (quasiment) de tout aujourd’hui ! Merci pour ces astuces à garder précieusement !

  3. Très bon article sur la diversité alimentaire. C’est une bonne idée de rendre l’alimentation plus ludique pour les enfants!

    1. L’apprentissage de l’alimentation est tellement important, si on peut leur enseigner à prendre soin de leur santé de façon ludique, c’est un atout majeur!

  4. Merci pour cet article que j’ai dégusté !
    J’ai une adolescente et une jeune adulte et ce n’est pas toujours facile pour cuisiner. J’essaie de trouver toutes les astuces possibles pour les faire manger équilibré.
    Je vais essayer ce que tu proposes 🙂

  5. Merci pour cet article très complet et intéressant. J’ai pris des notes. Ma petite à 20 mois, et les jours se suivent mais ne se ressemblent pas ! Quelque chose qu’elle va adorer un jour, ne voudra même pas être goûter un autre jour 😅 !

    1. Bonjour Nathalie,
      Votre petite fille démarre une période un peu difficile!!!
      Il ne faut surtout pas vous décourager, vous le dites vous-même les jours se suivent et ne se ressemblent pas!
      Essayez de l’associer dès que c’est possible à la préparation du repas et à la manipulation des aliments, souvent ça évite la « peur »de l’inconnu et c’est ludique!

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